Critiquer la société capitaliste, c’est bien, réclamer un autre monde possible, c’est légitime, mais tout cela restera incantatoire si nous ne disons pas ce que cet autre monde sera.
Site créé par Christian TIREFORT et Eric DECARRO pour publier leurs analyses, il accueille également celles de la branche suisse du réseau salariat. Le premier en fut le président jusqu’à son décès survenu le 14 décembre 2022.
Le 12 novembre 2016 nous tiendrons notre assemblée de constitution du groupe suisse de Réseau Salariat. Cette structure militante s’est fixée le but de montrer que nous ne sommes pas condamnés au capitalisme, que d’autres manières de produire, d’échanger, de coopérer, de financer, non seulement sont de la musique d’avenir mais existent déjà.
C’est Bernard Friot, l’écrivain français qui a publié de nombreux ouvrages sur le salariat, le travail, le statut de fonctionnaire et qui a résumé l’essentiel de ses idées dans son livre "Emanciper le Travail", coécrit avec Patrick Zech, qui a été et qui est encore l’inspirateur de cette organisation dont le but est l’autoformation et la formation des militantes et militants conscients que le capitalisme et sa propriété lucrative mène à la catastrophe.
Voici le texte rédigé par Aristides, Christian et Maël qui a accompagné l’invitation à l’assemblée de constitution de Réseau Salariat Suisse.
Ce refrain est plus que jamais répété tant par celles et ceux qui prennent les décisions réglant nos vies (politiciens, économistes, « experts » et « spécialistes » avant tout en art d’occuper la scène médiatique) que par les commentateurs officiels et autorisés de l’actualité (l’immense majorité des journalistes et chroniqueurs en tout genre).
Dans ce monde qu’on nous dit immuable, il n’y aurait plus qu’à choisir entre le cynisme de participer à un jeu macabre mettant la planète à feu et à sang et le désespoir de constater une absence d’alternative générale. Le Mur de Berlin tombé aurait emporté avec lui les derniers espoirs d’un changement de système.
L’absence d’une perspective crédible de transformation sociale explique la très inquiétante montée des droites extrêmes. C’est aussi cette absence qui explique partiellement le ralliement de la gauche et d’une bonne partie de la dite extrême-gauche à des recettes social-démocrate éculées, voire pire encore, le quasi ralliement de la social-démocratie au camp bourgeois et à son train de contre-réformes qui creusent encore davantage les inégalités et notre perte de pouvoir sur nos vies.
Répétons-le avec force, ce ne sont pas les gadgets censés corriger à la marge le système capitaliste qui nous rendront la maîtrise sur nos vies et nos destins. A force de vouloir aménager un capitalisme sans cesse plus féroce, c’est toute notre crédibilité que l’on perd.
Il est temps de se réapproprier le sens d’une histoire faite de conquêtes fondamentales plus que jamais actuelles. Ces avancées gagnées dans les luttes d’émancipation risquent de fondre comme neige au soleil sous les incessantes attaques des « réformateurs ». Or, et c’est le point décisif : il existe une alternative au capitalisme !
Nous le savons bien, sans lutte le capitalisme ne peut que mener au pire. Il ne suffit pas de résister, même durement, il est aussi temps de parler concrètement de comment s’en débarrasser et de dire par quoi le remplacer. Pour cela, il faut nous baser sur nos conquêtes, sur tout ce que nous avons construit et expérimenté jusqu’à aujourd’hui. Mais cela implique aussi de faire le ménage dans nos propres têtes, de garder le bon et jeter le mauvais, autrement dit de retrouver le potentiel émancipateur des conquêtes de nos ancêtres pour nous les réapproprier et les étendre.
Par exemple
Garder la cotisation sociale qui a notamment permis de développer un système de santé, un système de protection face au chômage, un système d’éducation, des services publics accessibles à toutes et tous
Jeter les privatisations qui transforment la santé, l’enseignement, les services en général, en produits marchands de plus en plus inaccessibles aux salarié-e-s et au commun des mortels
Garder un système de retraites qui assure à chacune/chacun un véritable salaire à vie et indépendant de toute contributivité préalable
Jeter les systèmes de retraites qui rendent les retraités dépendants du profit capitaliste ou de la « solidarité » par l’impôt
Garder et étendre les acquis des statuts des travailleuses et travailleurs de la fonction publique qui jouissent d’un salaire à vie basé sur une qualification attachée à la personne et non pas au poste de travail, un statut qui arme les salarié.e.s et leurs organisations contre l’arbitraire patronal, un statut qui libère les travailleuses et travailleurs de l’autoritarisme des patrons et des propriétaires des entreprises
Jeter l’emploi capitaliste qui soumet les salarié.e.s au marché de l’emploi et à l’arbitraire des employeurs.
Nous le disons bien fort avec Réseau Salariat : nous voulons contribuer à la construction d’une alternative à la société capitaliste. Elle est à la fois dans ce que nous avons conquis ensemble jusqu’à aujourd’hui et que le capital voudrait transformer en produits marchands et profitables et en pouvoir sur la société, mais elle est aussi dans nos têtes, dans notre capacité de penser ce que nous faisons pour changer le monde en nous appuyant sur le « déjà-là », sur ce qui a été conquis et qui fonctionne.
Réseau Salariat n’a pas toutes les réponses, mais il a quelques pièces essentielles du puzzle. Changeons donc sans attendre de lunettes pour nous approprier ensemble ces acquis et aller plus loin, imaginer les pièces manquant encore et les assembler.
Réseau Salariat soutient l’appropriation collective des moyens de production et la généralisation d’une pratique du travail non capitaliste. Il s’agit de nous affirmer comme des producteurs conscients d’être l’unique source de toute richesse produite.
C’est une structure de formation et d’autoformation. Vers l’intérieur, Réseau Salariat assure l’autoformation de ses membres ; vers l’extérieur, il offre de la formation à toute personne qui le désire et vise notamment les organisations syndicales et les mouvements sociaux.
Réseau Salariat fait de l’éducation populaire, il met à disposition le matériel vidéo, audio et écrit que ses membres produisent et sont invités à créer.
L’ensemble de ces productions, de même qu’un agenda des manifestations passées et à venir sont à disposition des membres et des groupes régionaux à l’adresse : http://www.reseau-salariat.info/?lang=fr
Toute personne, quelle que soit son appartenance politique, qui se déclare d’accord avec les buts de Réseau Salariat. Les membres s’acquittent d’une cotisation annuelle (entre 10 et 100 Euros par année), selon leurs capacités financières.